De vrais artistes

Publié le par Aurélie

Vendredi fut une journée découverte: "Les élèves peuvent-ils réutiliser leurs connaissances acquises au collège?" Réponse: en partie. Dans la nuit de jeudi à vendredi ils ont su appliquer ce qu'ils ont appris en sport, arts plastiques et français.

Ce fut donc une agréable surprise d'admirer l'oeuvre de nos chers petits. Ils sont venus au collège dans la nuit (qui a dit qu'ils n'aimaient pas venir à l'école?) pour taguer des mots doux à l'attention de la direction et des CPE qui ont été qualifiés de: "p_ _ _, co_ _ _ se, enc_ _ és...". Apparamment nos chers collègues éveillent des désirs incontrôlables chez certains de nos élèves qui se sont en plus permis d'uriner sur les murs et certaines portes.

Bref: panique à bord, et avis décisif de la Principale en pleurs: "On ne peut pas laisser les autres élèves voir ça, ils doivent rester dehors pour le moment." Les agents de surface commencent à effacer les marques avec du dissolvant, même si nous savons tous que ça ne partira pas comme ça. Là, le CPE m'annonce que si les tags ne sont jamais retirés, c'est parce que une partie des bâtiments (dont celle qui à servie de support à nos artistes) est classée monument historique, et pour repeindre, il faut monter un dossier auprès des autorités compétentes. Vue l'inertie de l'administration locale, on renonce à dissimuler les tags. D'ailleurs le deuxième nom du collège c'est "GROS QUEQUETTE", tag qui trône en grand depuis des années sur le mur d'entrée de l'établissement!

Notre principale, décide de passer outre l'autorisation, et demande aux agents de repeindre les murs jaunes. Dès que les policiers sont venus admirer les dégâts, les agents passent une couche de peinture blanche, puis comme cela ne masque pas complètement le texte, ils choisissent le rouge pour la deuxième couche. Notre magnifique bâtiment, est maintenant jaune à tâches rouges... pas sûre que cela soit validé par la commission des monuments historiques.

Nous faisons finalement rentrer les élèves, surexcités après près d'une heure d'attente dans la rue. Ils sont parqués dans la cours d'honneur (j'ai pas trop compris pourquoi), là on les laissent s'énerver davantage, et au bout d'une demie-heure, la principale prend le micro et leur annonce les faits, à grands coups de morale sur le but de l'école... Nous nous réunissons une demie-heure pour décider de la suite à donner aux évènements. Tout le monde décide de "débrayer", c'est à dire de ne pas faire cours durant la matinée; pour "marquer le coup", suivi d'un après-midi éducation civique pour tous, sous forme de débat. Personnellement, je trouve que cela donne surtout une nouvelle raison aux élèves de recommencer: une journée de récréation pour tout tag insultant écrit sur les murs du collège!

La nouvelle est annoncée aux élèves qui hurlent de joie en apprenant qu'il n'y aura pas cours. C'est marrant comme on se sent vraiment en minorité lorsqu'on est une vingtaine devant plus de 800 élèves qui hurlent de joie. Les images révolutionnaires du peuple brandissant les têtes ensanglantées des dirigeants me sont soudainement passées à l'esprit. L'autorité tient à si peu de chose (je le constate tous les jours dans les classes). Puis ils apprennent qu'ils devront malgré tout rester dans le collège. Là, ils commencent à huer et siffler la Principale qui s'énerve en répétant que décidément, ils n'ont rien compris au collège. Leur proposant de ne pas s'inscrire à l'école si ça ne les intéressent pas (vous croyez qu'elle est au courant que l'école est obligatoire jusqu'à 16 ans, et qu'on ne peut pas toucher les alloc si on n'y envoit pas ses enfants?). Nous avons donc passé la matinée à courir après nos élèves pour faire l'appel. Il y a eu quelques bagarres, comme d'habitude, des hurlements comme toujours, mais pas de catastrophe, donc on s'en est bien sorti, juste avec une migraine.

L'après-midi: impro totale sur le cours d'éducation civique en commençant par un débat. J'étais contente, j'avais ma meilleure classe, c'est à dire la seule et l'unique à qui j'arrive à enseigner quelque chose. Sujet: A quoi servent les règles? Voici les réponses de la meilleure cinquième du collège: "Ca sert à être contourné, sinon on en ferait pas... Madame, on est jeune, si on profite pas de la vie maintenant, quand est-ce qu'on va le faire?" Je leur ai dit qu'il y avait un temps pour tout, un pour travailler et qu'après on pouvait s'amuser, et c'est pas parce qu'on a plus de 25 ans et qu'on travaille qu'on ne peut plus s'amuser. De toute évidence, ils ne pouvaient même pas s'imaginer qu'un adulte puisse s'amuser: peine perdue. Après, j'ai laissé tombé l'éducation civique (surtout que j'avais cours avec mes terreurs), donc j'ai fait un cours d'anglais, enfin j'ai essayé comme d'habitude. En tout cas c'est un peu moins déprimant. Je crois qu'il aurait été plus profitable de faire un cours de français à partir des tags en corrigeant l'orthographe. Hé oui! Ils ne peuvent même pas proférer des insultes sans faire de fautes!

JE NE SUIS PAS EDUCATRICE... JE VEUX REDEVENIR PROF!!!!!!!!!

Publié dans Au tableau!

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M
On devrait fonder un club pour les profs frustrés qui aimeraient faire cours dans de bonnes conditions avec des élèves sympas et motivés. C'est marrant la représentation des élèves type-IUFM et ceux in-real-life n'est pas *du tout* la même...
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